Eric Zemmour : Sa vie, son oeuvre...

TELE STAR : Dire à Paul-Loup Sulitzer, convalescent, que son dernier livre ne contient rien de nouveau et qu’il a été écrit par ses nègres, n’est-ce pas tirer sur une ambulance ?

ERIC ZEMMOUR : Si, et c’est même pour ça que je n’ai pas trop chargé. J’ai été beaucoup plus dur il y a quelques mois avec Harry Roselmack, venu promouvoir son très mauvais livre. Là, c’était une boucherie !

Critiquer Bernard Werber sans avoir lu son livre, n’est-ce pas saper le fondement de vos critiques ?

Au départ, Catherine Barma (la productrice) ne m’avait pas demandé d’intervenir sur lui. Et finalement, si. Alors j’ai donné mon avis après avoir parcouru deux pages de Vous, les dieux. Je ne regrette rien, ses livres m’ennuient. Werber vend beaucoup, tant mieux. Mais c’est écrit avec les pieds, comme Marc Lévy. Ça me met hors de moi.

Dire que vous donneriez tout l’art contemporain contre un tableau de Vermeer, ou tout Joey Starr contre une chanson de Brel, n’est-ce pas jouer au vieux con réac ?

Mais je suis un vieux con réac ! J’écoute vraiment Aznavour et Brel en boucle, j’ai passé mon été à relire Chateaubriand...

Laurent Ruquier résume systématiquement vos interventions, comme si elles étaient trop compliquées pour le téléspectateur, c’est humiliant ?

Ça m’agace parfois, oui. Laurent me trouve trop long. C’est surtout que nous sommes opposés politiquement ! Lui, il incarne le politiquement correct, la pensée dominante libertaire qui règne en télé. Quand il reçoit BHL et qu’il lui dit en ouvrant son livre « Tout me va », j’ai envie de bondir ! C’est normal que j’aie un peu de temps derrière pour déconstruire cette pensée dominante.

Vous êtes de droite, comme 6 % seulement de journalistes. S’ils étaient majoritairement de droite, seriez-vous de gauche, histoire de continuer à contester ?

(Il sourit.) Je n’y ai pas réfléchi. C’est vrai, j’aime contester. Mais je ne suis pas un opportuniste. Mes idées, je les défends depuis quinze ans.

Vous reprochez aux femmes d’être des « salariées comme les autres ». Catherine Barma, votre productrice, devrait faire de la broderie ?

Au risque de passer pour un vieux con, je crois que le salariat profite à celles - comme Catherine - qui ont un métier épanouissant. Mais demandez aux caissières si elles ne préféreraient pas avoir un mari qui gagne suffisamment sa vie pour leur éviter de travailler.

N’est-il pas déplacé de réclamer le retour de l’autorité aux hommes dans le couple quand tant de femmes meurent de violences conjugales ?

Je ne parle pas de cette autorité-là, évidemment. Je dis juste que l’autorité est un symbole qu’il ne faut pas nous ôter : mon grand-père passait, pour le plus grand macho du bassin méditerranéen, alors que c’était ma grand-mère qui dirigeait tout...

Vous dénoncez la féminisation des hommes et la mort du père à l’ancienne. Quel père êtes-vous pour vos trois enfants ?

Je n’ai jamais participé au maternage : ni biberon, ni bain, ni couches. Par contre, je suis celui qui dit non. Je leur passe Brel en boucle, je leur donne à lire Alexandre Dumas, je leur transmets mon amour de la France. Ma fille de 3 ans chante La Marseillaise ! C’est mon fils aîné qui lui a appris ! (Il rit.)

PROPOS RECUEILLIS PAR SYLVIA DE ABREU

Journaliste de presse pour Le Figaro, mais aussi de télévision dans On n’est pas couché sur France 2, Eric Zemmour s’est déjà fait remarquer dans le monde littéraire avec des ouvrages comme L’Homme qui ne s’aimait pas (Balland, 2002), L’Autre (Denoël, 2004) et surtout Le Premier Sexe (Denoël, 2006).

Avec Petit frère, l’auteur signe un roman sur les tensions communautaires de la société française. Dans ce livre, il raconte la prise de conscience par ’"un ancien journaliste, devenur riche producteur de télévision et auteur d’essais à succès" de la société d’aujourd’hui. Alors que le narrateur dîne avec un ami ministre, il apprend le meurtre du jeune Simon Sitruk. Le ministre Pierre Lambert s’inquiète du rententissement de cet assassinat et le charge d’enquêter afin d’étouffer l’affaire.

Le héros découvre une famille persuadée du caractère antisémite du meurtre. Avec une journaliste du Parisien, il décide d’enquêter et se rend compte que les deux jeunes gens étaient amis d’enfance. Déboussolé, le narrateur comprend alors les tensions du quartier, l’envers du décor qu’il n’avait pas saisi dans les années 80.

Ce roman qui traite de la question de l’antiracisme et de l’identité française entraîne le lecteur des quartiers populaires de Paris aux hôtels particuliers des ministères. Présenté par la maison d’édition comme un ouvrage "brillant et lucide", Petit frère pourrait s’imposer comme l’un des livres phares de cette rentrée littéraire 2008.

Éric Zemmour, Petit Frère
- Sortie : le 3 janvier 2008
- Roman (éditions Denoël)
- 208 pages
- 20 euros